Des contradictions sociales internes et externes à Saint-Domingue ont provoqué le mécontentement et la révolte dans la colonie. Des faits tant en France que sur le sol saint-domingois ont débouché sur une insurrection généralisée.
Au début de la colonisation de la partie ouest de Hispaniola par la France, colons, engagés et mulâtres libres se côtoyaient, s’entraidant dans certains travaux et remplissant tous des fonctions diverses dans la force militaire organisée à Saint-Domingue. Il y avait peu d’habitants et rares étaient ceux de la Métropole souhaitant s’installer dans la colonie. Au fil des ans, toutefois, la situation changea. La production augmenta. La colonie devint un territoire attirant des nobles qui y voyaient une source de biens et de revenus certains ainsi qu’une garantie de privilèges personnels de toutes sortes. C’est alors que commença à se faire sentir une différence entre les divers types de résidents. Dès 1685, il fallut avoir recours au Code Noir. Ce Code précisait les peines devant être infligées aux esclaves et les distances sociales à prendre vis-à-vis des mulâtres et noirs libres pour freiner leur liberté et égalité.
Le 7 janvier 1767, on passa même un décret interdisant aux descendants libres de race noire d’occuper des fonctions publiques dans la colonie. Les différences raciales et le préjugé se firent de plus en plus sentir. Les enfants des mulâtres et noirs libres en souffraient à St Domingue mais aussi en France où bon nombre d’entre eux achevaient leurs études. Ces jeunes provenant de la colonie se liaient outre-mer à des parents d’origine française et discutaient avec eux de leurs problèmes. Certains d’entre eux allaient plus loin en rejoignant des mouvements de contestations sociales propres à la métropole.
Par exemple, dès 1784, Julien Raymond agitait en territoire français des idées en faveur des mulâtres libres de Saint-Domingue. Jean-Baptiste Belley, un noir, et un Martial Desse, un mulâtre, en faisaient de même lors de leurs séjours à la métropole en tant que membre de la Constituante. En 1787, les idées d’égalité remuées en France dans le cadre de la lutte contre l’aristocratie amenèrent les Condorcet, Mirabeau, Pétion, Clavières, Vergniaud, Grégoire à fonder la Société des Amis des Noirs. En contrepied, était créé le Club Massiac anti-négrophile, par Barnave, défenseur du peuple qui prônait un système colonial indépendant de la Métropole. Par la suite, certains demandaient d’interdire aux propriétaires d’habitations d’être fonctionnaires ou d’autres souhaitaient voir la colonie placée sous un protectorat avec le droit de se gouverner.
En 1789, se fut l’aboutissement des Etats Généraux réclamés en France depuis 1780. Parallèlement, des demandes d’égalité pour les affranchis fusaient tant en France qu’à Saint-Domingue. Des idées de droits humaines circulaient aussi. Aussi, il y eut, en 1790, l’affaire Fernand de Baudières qui vint porter ces revendications à leur paroxysme sur le sol même de Saint-Domingue. Ceci créa une animosité entre blancs de diverses opinions, dans la colonie même. Un décret d’abolition de la féodalité tant en France qu’à Saint-Domingue en 1790 vint renforcer les revendications dans la colonie de Saint-Domingue et les luttes des activistes affranchis en France . Vincent Ogé qui y menait un mouvement énergique fut bientôt obligé de quitter la France. D’autres tels que Rigaud et Pinchinat y furent emprisonnés pour un certain temps. Le Club Massiac royaliste et anti-esclavagiste se durcit tandis que les affranchis et colons libéraux républicains jouèrent le jeu pro-métropole tout en réclamant des droits égaux pour les libres. Ogé rentra à Saint-Domingue pour militer, en passant par l’Angleterre et les Etats Unis. Il décida d’y poursuivre les réclamations, aidé de son beau-frère, Chavannes. Ils furent combattus, arrêtés, exécutés à Saint-Domingue par la milice coloniale et certains colons, en février 1791, au Cap Français.
L’anarchie s’installa dans la colonie. La lutte entre différents groupes de blancs d’abord, et entre les affranchis libres et certains blancs à tendance esclavagiste devint alors ouverte et féroce. Le 15 mars 1791, à Bordeaux, Angers, Chalon en France, des citoyens français, blancs, réclamèrent ouvertement que tout descendant de père et mère libres devait jouir de ses droits politiques, dans la colonie. Cette demande fut agréée et promulguée au Cap Français le 30 juin 1791. Cependant, fatigués et abusés, bien que Julien Raymond demandait aux affranchis de rester attachés à la France révolutionnaire et d’avoir une attitude pacifique, des libres, mulâtres et noirs, ces derniers s’appliquèrent alors à se joindre aux esclaves et à les armer. Ces deux groupes commençaient à sentir fortement l’injustice et une alliance solide allait se former entre eux. Des groupes d’esclaves marrons s’organisaient et attaquaient leurs maîtres à l’époque. Des royalistes faisaient de même en donnant à certains esclaves la liberté. La France délégua, en toute urgence, des commissaires à Saint-Domingue. Ils tentèrent de faire la balance en essayant de plaire aux affranchis et généraux indigènes de l’Armée Coloniale en les ralliant aux visées de la Métropole tout en assouplissant les rapports humains d’alors. Cependant, bon nombre de gens de couleur sceptiques et déçus croyaient uniquement en la nécessité de s’allier aux esclaves et de se soulever. Du côté des esclaves, la première grande révolte eut lieu le 22 août 1791 après un congrès tenu le 14 août. Leurs revendications se généralisèrent sans tarder tandis que leur alliance avec les affranchis et les chefs militaires indigènes de l’Armée coloniale allait grandissant. Parallèlement, les colons divisés sur le sort futur de la colonie et aussi sur les relations à adopter vis-à-vis des affranchis et des esclaves se chamaillaient entre eux, quittaient la colonie découragés d’autant qu’avec ces troubles et aussi avec l’influence de la révolution et des guerres en France le développement économique saint-saint-domingois baissait.
Quelles sont les idées véhiculées en France en rapport aux colonies et en rapport aux gens de couleur de Saint-Domingue au moment des Etats Généraux à Paris? Citez quelques grandes décisions prises en France qui devaient avoir une grande influence sur la vie des libres et esclaves. Listez-les.
Quelles sont les positions de différents groupes de blancs en France et à Saint-Domingue sur les questions raciales et sociales à l’époque? Sont-ils divisés ou tous du même avis? Expliquez vous.
Quelles sont, à l’époque, les aspirations des libres et celles des esclaves? Sont-elles les mêmes dans les mêmes pour les affranchis que pour les esclaves? Sont- ils d’accord à s’unir dès le début? Si non, pourquoi hésitent-ils à le faire et à partir de quand font-ils alliance? Justifiez votre réponse.